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Dans quelle mesure peut-on « reconstruire » un bâtiment existant en zone agricole ou naturelle ?

mercredi, 02 août 2017 09:49

S’il n’est possible de réaliser une opération immobilière qu’à de rares exceptions en zone A ou en zone N, l’encadrement règlementaire du droit à construire est en principe moins restrictif lorsqu’il s’agit de travailler sur un bâtiment existant, que lorsqu’il s’agit d’un tout nouvel ouvrage. Mais attention, ce n’est pas aussi simple. Illustration récente par le Tribunal administratif de LYON… (TA LYON, 4 juillet 2017, req. n° 1700769 & 1700773, Préfet de l’AIN).

Vous envisagez de restaurer une construction ancienne ? Vous voulez vivre à la campagne le plus isolé possible du centre-bourg, mais malheureusement il s’agit d’une zone naturelle ou agricole, et puisque vous n’êtes pas agriculteur, vous ne pouvez pas réaliser une construction nouvelle : comment pouvez-vous vous tourner vers la réhabilitation d’un bâtiment existant ?

Vous êtes le Maire d’une Commune rurale, on vous sollicite pour un permis de construire portant sur l’aménagement ou le changement d’affectation d’une ancienne ferme : pouvez-vous accorder l’autorisation ou, au contraire, devez-vous la refuser ?

Voici les réponses…

Rappel de l’encadrement règlementaire général :

Généralement, les PLU interdisent en zones A ou N les constructions à usage d’habitation, sauf lorsque c’est nécessaire à l’exploitation agricole, ou encore au stockage et à l’entretien des matériels agricoles (articles R. 151-23 et R. 151-25 du code de l’urbanisme).

En revanche, peuvent être autorisés l’aménagement ou le changement de destination de constructions existantes, les extensions mesurées de bâtiments d’habitation, etc. (voir également, articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13 du code de l’urbanisme).

Dans une telle hypothèse, il conviendra de ne pas compromettre l’activité agricole de la zone ou la qualité paysagère du site.

Mais surtout, que doit-on précisément entendre par construction existante ou bâtiment d’habitation existant ?

Contours pratiques de la notion de construction existante :

La réhabilitation, la restauration, la transformation, voire l’extension mesurée, d’une construction existante, en zone A ou N, devra en principe toujours être possible, à la seule condition qu’il ne s’agisse pas d’une ruine

Les textes ne définissent ni la construction existante, ni a contrario la ruine. Il convient donc d’observer la jurisprudence des tribunaux administratifs.

Ainsi, peu importe qu’une bâtisse du 19e siècle ne soit plus habitée depuis des années, elle restera une construction existante – et non une ruine – si elle a conservé la totalité de son gros-œuvre, sa toiture et ses murs extérieurs (CAA MARSEILLE, 10 décembre 1998, req. n° 97MA00527, Commune de CARCES ; AJDA 1998, p. 441, concl. Savoie). Peu importe également que, dans cette affaire, le bâtiment avait perdu ses menuiseries extérieures et le plancher de son premier étage, cela n’était pas de nature à le qualifier d’état de ruine privant de la possibilité d’obtenir un permis de construire aux fins de restauration.

Inversement, un chalet entièrement détruit, et dont il ne subsiste que des vestiges, est une ruine qui ne permet pas d’obtenir un permis de construire aux fins de restauration (CE, 11 mai 1994, req. n° 129592, Commune de Villard Saint-Pancrace).

De même, s’il n’y a plus de toiture et que les murs sont détruits, même partiellement, pas de permis de construire possible (CE, 25 novembre 1992, req. n° 104195, Commune de Claix). Un ancien moulin à huile aura ainsi été qualifié de ruine parce qu’il avait en grande partie perdu ses murs, et fatalement sa toiture (CAA MARSEILLE, 21 octobre 2004, req. n° 00MA01838, Commune de Saint-Paul). A fortiori, s’il ne subsiste qu’un seul mur et des fondations presque invisibles, il ne faudra pas compter sur un ancien cadastre napoléonien pour obtenir un permis… (CAA BORDEAUX, 6 septembre 2011, req. n° 10BX02824, Commune de La Bastide-Clairence).

Donc prudence lorsque vous examinerez sous toutes les coutures la bâtisse pressentie, car il suffit qu’une partie de la toiture soit « tombée » pour que, même si c’est injuste à vos yeux, l’Administration la qualifie de ruine (CAA BORDEAUX, 17 décembre 2007, req. n° 05BX01811, Préfet de la Charente-Maritime).

Qu’en est-il de la jurisprudence plus récente, notamment lyonnaise :

Les principes décrits plus haut restent les mêmes.

Dans un jugement récent, le Tribunal administratif de LYON relève implicitement, en plus, que la construction doit être close pour être considérée comme existante et doit compter une surface plancher (TA LYON, 4 juillet 2017, req. n° 1700769 & 1700773, Préfet de l’AIN : certes, il s’agissait de transformer dans cette affaire un hangar agricole en maison d’habitation, mais il n’en demeure pas moins que la décision est à certains égards sévère parce qu’il y avait bien une toiture complète, ainsi qu’une structure de gros-œuvre reposant sur des piliers en béton, et quelques éléments extérieurs).

Conseil pratique :

Si vous souhaitez donc réhabiliter une construction ancienne en zone A ou en zone N, faites-vous donc conseiller.

Soyez particulièrement vigilant à la caractérisation de ces critères dans le dossier de permis de construire et veillez bien à identifier une surface plancher préexistante dans le formulaire Cerfa de votre demande. Si vous êtes Maire, vérifiez au même titre ces éléments avant de prendre votre décision.

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