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Quel est l’impact de la réforme du droit des obligations en cas d’inexécution d’un  contrat de construction ?

jeudi, 23 février 2017 09:32

L’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, révolutionne les titres III à IV bis du Livre III du Code civil (plus de 350 articles concernés). La réforme est entrée en vigueur le 1er octobre 2016 (sous quelques réserves).

1 - La réduction du prix en cas d’ouvrage inachevé

Selon le nouvel article 1223 du Code civil, le créancier peut, après mise en demeure, accepter une exécution imparfaite du contrat et solliciter une réduction proportionnelle du prix. S'il n'a pas encore payé, le créancier notifie sa décision de réduire le prix dans les meilleurs délais.

La réception d’un ouvrage inachevé peut ainsi donner lieu à une réduction du prix proportionnelle du prix, en fonction de l’imperfection constatée.

Le créancier doit adresser une mise en demeure au débiteur d'exécuter le contrat. Si cette mise en demeure est sans effet, il pourra notifier sa décision de réduire le prix dans un délai raisonnable.

Beaucoup d’interrogations quant à l’application de cet article restent sans réponse : cette réduction est unilatérale ? Comment appréhender la notion de proportionnalité ? Quel est ce délai raisonnable ? Il faudra ici attendre des décisions jurisprudentielles pour mieux cerner le contour de cette réduction de prix.

2 - La résolution du contrat

La résolution du contrat être réalisée par le biais de trois mécanismes, à savoir la résolution unilatérale, la clause résolutoire, ou la résolution judiciaire.

2.1 – La résolution unilatérale

Le nouvel article 1226 du Code civil prévoit que le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable

Une forme particulière est prescrite, puisque la mise en demeure doit mentionner expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.

Une fois la mise en demeure notifiée, et lorsque l'inexécution persiste, le créancier  peut notifier au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.

En cas de notification d’une résolution, le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution.  C’est donc un exercice périlleux pour le créancier, qui met en œuvre la résolution à ses risques et périls. On retrouve ici tout l’intérêt de rédiger des clauses résolutoires, prévoyant précisément les cas de résolution…

2.2 – La clause résolutoire

Selon l’article 1225 du Code civil, la clause résolutoire est une clause du contrat précisant les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat.

La rédaction des clauses résolutoires doit être précise, afin d’éviter les insécurités juridiques dans le cadre de leur mise en œuvre.

Les conditions de mise en œuvre de la clause résolutoire sont simples : la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse (s'il n'a pas été convenu dans le contrat que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution). Un point de vigilance toutefois : la mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire. 

2.3 – La résolution judiciaire

Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts (article 1228 du Code civil).

La jurisprudence rendue sous l’ancien article 1184 du Code civil est toujours valable. Ainsi, il appartient au juge d'apprécier les inexécutions constatées : notamment, si le retard dans l'exécution est d'une gravité suffisante (Cass.  Civ. 1re, 4 janv. 1995:, Bull. civ. I, no14), ou si  une inexécution partielle d'un contrat porte sur une obligation déterminante de la conclusion du contrat (Cass. Com. 2 juill. 1996: Bull. civ. IV, no 198).

3 - L'exception d'inexécution

L’article 1219 du Code civil permet de mettre en œuvre le mécanisme de l’exception d’inexécution : une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne, et si cette inexécution est suffisamment grave. 

Ici encore, ce sera à la partie refusant l’exécution de juger le degré de gravité de l’inexécution. 

Une faculté de suspension existe désormais en cas de risque d’inexécution : une partie peut suspendre l'exécution de son obligation dès lors qu'il est manifeste que son cocontractant ne s'exécutera pas à l'échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais (article 1220 du Code civil). La suspension est par principe provisoire, et le contrat perdure, en attendant que l’autre partie s’exécute.

4 - La clause d'indemnisation

La clause d’indemnisation est une clause stipulant que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts (article 1231-5 du Code civil). Le principe selon lequel il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre est rappelé dans le cadre de la réforme. Le juge peut toujours, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Il n’y a donc pas de bouleversement par rapport à l’ancien régime juridique de la clause pénale (ancien article 1152 du Code civil).

Un changement tout de même : lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier.

Autre évolution : il est prévu expressément que sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.

 

 

A noter que pour les contrats de vente en l’état futur d’achèvement, le contrat ne peut stipuler forfaitairement, en cas de résolution, le paiement, par la partie à laquelle elle est imputable, d'une indemnité supérieure à 10% du prix (article L 261-14 du Code de la construction et de l’habitation).

Des exceptions sont également applicables pour les contrats de construction de maisons individuelles (R 231-14 et 232-7 du Code de la construction et de l’habitation).

5 - L'exécution forcée

L’article 1221 du Code civil  modifie le régime de l’exécution forcée en nature. Le créancier d'une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l'exécution en nature, sauf si cette exécution est impossible, ou s'il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur et son intérêt pour le créancier. 

L’impossibilité de l’exécution était déjà une condition de l’exécution forcée. Il faudra en revanche  désormais calculer la disproportion entre le coût pour le débiteur et l’intérêt pour le créancier.

Le mécanisme de la garantie d’achèvement, permettant l’achèvement de l’ouvrage, est toujours applicable pour les désordres réservés à la réception, et s’appliquera par priorité.

6 – Le remplacement du contractant

Après mise en demeure, le créancier peut aussi, dans un délai et à un coût raisonnables, faire exécuter lui-même l'obligation ou, sur autorisation préalable du juge, détruire ce qui a été fait en violation de celle-ci. Il peut demander au débiteur le remboursement des sommes engagées à cette fin. Il peut aussi demander en justice que le débiteur avance les sommes nécessaires à cette exécution ou à cette destruction (article 1222 du Code civil).

Désormais, le créancier peut, après mise en demeure, faire intervenir un tiers, cela sans autorisation judiciaire préalable, et peut obtenir le remboursement des sommes payées au tiers.

En matière de contrat de travaux, et si le contrat ne l’a pas exclu, ce mécanisme permettra de débloquer des situations inconfortables en faisant réaliser rapidement les travaux.

La même faculté de remplacement existe déjà par le biais de de la garantie de parfait achèvement (article 1792-6 du Code civil).

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